Souvenir des années 1970 et 1980… l’ambiance politique était plus proche de la guerre civile qu’aujourd’hui. Les gens de droite et de gauche avaient du mal à se parler, et, collégien, puis lycéen et étudiant, je n’avais pas encore abordé ces milieux où l’on peut se parler tranquillement entre sensibilités différentes, sans chercher à se convaincre où à remporter je ne sais quelle victoire fictive devant un auditoire promu malgré lui au rang d’arbitre.
Souvenir d’une gauche au pouvoir décevante après 1981, dont, finalement, on ne pouvait pleinement saisir et approuver l’évolution au pouvoir que de l’extérieur, tant elle était imposée par la dure réalité, par la résistance du réel à l’idéalisme inconséquent. D’une embardée à l’extrême gauche pour pouvoir prolonger la fidélité au mythe, et puis d’un ralliement à la droite modérée.
La droite républicaine de l’époque avait bien des défauts, mais elle me paraissait moins sectaire, moins assurée de son bon droit, moins persuadée d’être le « parti des gens bien » que la gauche d’alors. Il y était alors plus facile d’être modéré, libéral au sens le plus profond du terme, de s’intéresser au « camp d’en face », à son évolution. Alors même que la gauche découvrait enfin Raymond Aron, on l’y appréciait depuis longtemps. Pour un intellectuel, il semblait y avoir là plus de liberté, plus de souplesse, plus de relativisme, quand bien même les leaders y étaient souvent décevants.
Des ponts intellectuels s’y tissaient avec le centre gauche, qui redécouvrait le patrimoine démocratique et si bien sûr, comme dans tous les camps, il y avait une arrogance, celle-ci semblait justifiée par la longue lutte contre le communisme, qui semblait encore redoutable sur le plan international alors qu’il achevait de se déliter.
Bref, on pouvait se montrer modéré et large. J’ai l’impression aujourd’hui que ce temps n’est plus.
Le feu d’artifice de Nicolas Sarkozy, qui a commencé par rassembler toutes les sensibilités de la droite républicaine pour les jeter dans une action confuse, même si ici ou là elle n’est pas sans mérite, a eu sur ce milieu un effet délétère que nous mesurons aujourd’hui.
Face au succès (il faut bien commencer par le dire !) des primaires socialistes, qui investissent largement après un débat de bonne tenue un candidat que l’on aura du mal à faire passer pour un dangereux révolutionnaire ou un irresponsable, on attendait une autre réaction de l’UMP.
Aurait-il été si compliqué de dire en substance : « Nous nous réjouissons de voir que la gauche de gouvernement a pu débattre, désigner son candidat, mobiliser son camp, parce que nous aimons la démocratie. Nous félicitons François Hollande de sa victoire. Il est bon pour nous, et pour le débat politique à la qualité duquel nous sommes attachés, d’avoir face à nous un candidat de qualité. Demain commence une nouvelle étape : nous allons débattre projet contre projet, et faire valoir contre lui nos arguments » ?
Les réactions hargneuses, et, pour tout dire, sans fair play ni classe, de Jean-François Copé ou de Christian Jacob, la réaction crispée de François Fillon, l’attaque sur le champ et sans contre-proposition du projet socialiste, la reprise sans vergogne des attaques de Martine Aubry contre François Hollande, tout cela est pitoyable. Réaction de mauvais joueurs, d’enfants jaloux, d’entêtés qui ne peuvent se résoudre au démenti de leur prévision d’une primaire catastrophique pour le PS.
Complaisance sectaire dans le négatif, tout en expliquant le projet présidentiel n’est pas encore au point, attaque prématurée et contreproductive… tout cela donne une impression de vide idéologique et de fébrilité. Quitte à être antipathiques, il faudrait au moins être efficaces.
Mise en ordre du bilan, édification de nouveaux projets, définition d’une ligne pour la campagne ; si l’on n’a pas fait tout cela, il ne reste qu’à taper sur le « camp d’en face ». Mais qui cela peut-il convaincre ?
La droite républicaine ne peut exister que si elle incarne un certain réalisme, le souci de l’unité nationale et le respect pour les institutions qui garantissent le libre débat dans le pays. Cela n’est praticable qu’en avançant ses propres propositions. Même ainsi, la défaite est possible, et même probable. Mais pourquoi anticiper celle-ci en se jetant dans une offensive de mauvaise foi, désespérée et inopportune ?
La droite d’aujourd’hui devient progressivement irrespirable pour les modérés qui n’y pèsent plus et n’arrivent même plus à inspirer aux débats une tonalité apaisée. Émiettés, sans candidat crédible, qu’ont-ils à faire dans une campagne qui s’annonce nauséabonde ?
Souvenir d’une gauche au pouvoir décevante après 1981, dont, finalement, on ne pouvait pleinement saisir et approuver l’évolution au pouvoir que de l’extérieur, tant elle était imposée par la dure réalité, par la résistance du réel à l’idéalisme inconséquent. D’une embardée à l’extrême gauche pour pouvoir prolonger la fidélité au mythe, et puis d’un ralliement à la droite modérée.
La droite républicaine de l’époque avait bien des défauts, mais elle me paraissait moins sectaire, moins assurée de son bon droit, moins persuadée d’être le « parti des gens bien » que la gauche d’alors. Il y était alors plus facile d’être modéré, libéral au sens le plus profond du terme, de s’intéresser au « camp d’en face », à son évolution. Alors même que la gauche découvrait enfin Raymond Aron, on l’y appréciait depuis longtemps. Pour un intellectuel, il semblait y avoir là plus de liberté, plus de souplesse, plus de relativisme, quand bien même les leaders y étaient souvent décevants.
Des ponts intellectuels s’y tissaient avec le centre gauche, qui redécouvrait le patrimoine démocratique et si bien sûr, comme dans tous les camps, il y avait une arrogance, celle-ci semblait justifiée par la longue lutte contre le communisme, qui semblait encore redoutable sur le plan international alors qu’il achevait de se déliter.
Bref, on pouvait se montrer modéré et large. J’ai l’impression aujourd’hui que ce temps n’est plus.
Le feu d’artifice de Nicolas Sarkozy, qui a commencé par rassembler toutes les sensibilités de la droite républicaine pour les jeter dans une action confuse, même si ici ou là elle n’est pas sans mérite, a eu sur ce milieu un effet délétère que nous mesurons aujourd’hui.
Face au succès (il faut bien commencer par le dire !) des primaires socialistes, qui investissent largement après un débat de bonne tenue un candidat que l’on aura du mal à faire passer pour un dangereux révolutionnaire ou un irresponsable, on attendait une autre réaction de l’UMP.
Aurait-il été si compliqué de dire en substance : « Nous nous réjouissons de voir que la gauche de gouvernement a pu débattre, désigner son candidat, mobiliser son camp, parce que nous aimons la démocratie. Nous félicitons François Hollande de sa victoire. Il est bon pour nous, et pour le débat politique à la qualité duquel nous sommes attachés, d’avoir face à nous un candidat de qualité. Demain commence une nouvelle étape : nous allons débattre projet contre projet, et faire valoir contre lui nos arguments » ?
Les réactions hargneuses, et, pour tout dire, sans fair play ni classe, de Jean-François Copé ou de Christian Jacob, la réaction crispée de François Fillon, l’attaque sur le champ et sans contre-proposition du projet socialiste, la reprise sans vergogne des attaques de Martine Aubry contre François Hollande, tout cela est pitoyable. Réaction de mauvais joueurs, d’enfants jaloux, d’entêtés qui ne peuvent se résoudre au démenti de leur prévision d’une primaire catastrophique pour le PS.
Complaisance sectaire dans le négatif, tout en expliquant le projet présidentiel n’est pas encore au point, attaque prématurée et contreproductive… tout cela donne une impression de vide idéologique et de fébrilité. Quitte à être antipathiques, il faudrait au moins être efficaces.
Mise en ordre du bilan, édification de nouveaux projets, définition d’une ligne pour la campagne ; si l’on n’a pas fait tout cela, il ne reste qu’à taper sur le « camp d’en face ». Mais qui cela peut-il convaincre ?
La droite républicaine ne peut exister que si elle incarne un certain réalisme, le souci de l’unité nationale et le respect pour les institutions qui garantissent le libre débat dans le pays. Cela n’est praticable qu’en avançant ses propres propositions. Même ainsi, la défaite est possible, et même probable. Mais pourquoi anticiper celle-ci en se jetant dans une offensive de mauvaise foi, désespérée et inopportune ?
La droite d’aujourd’hui devient progressivement irrespirable pour les modérés qui n’y pèsent plus et n’arrivent même plus à inspirer aux débats une tonalité apaisée. Émiettés, sans candidat crédible, qu’ont-ils à faire dans une campagne qui s’annonce nauséabonde ?