lundi 30 juin 2008

S'inscrire dans la durée


Avant le basculement dans la trompeuse torpeur estivale, le paysage politique prend un petit air statique, il semble (illusion sans doute) que l’on peut mieux le saisir. Le ralentissement du rythme de la vie intellectuelle dans les universités dépeuplées de leurs étudiants semble se communiquer à l’actualité nationale, parce que les Français commencent à penser à leurs vacances, dans un pays qui a voulu plus que d’autres s’attarder dans la société des loisirs…
Le travail de fond continue. Les réformes durables, les tournants en cours, les œuvres qui s’écrivent continuent de s’écrire, les entreprises tournent. On réfléchit aussi aux mesures que l’on tentera de faire passer pendant l’été, même si le procédé a montré ses limites pour empêcher les manifestations. Les syndicats se demandent sur quoi ils mobiliseront à l’automne. C’est donc le temps des veillées d’armes et du travail de fond.
Oui, la torpeur peut être trompeuse. Le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin, épuisé par sa victoire dans la réforme des retraites, bascula dans le néant après l’épisode de la canicule de l’été 2003. C’était la fin définitive des espoirs de renouveau suscités, a contrario, par le choc de l’élection présidentielle de 2002.
Les pauses, même apparentes, comme celle de l’été, sont là pour nous rappeler que rien ne se fait vraiment qui ne s’inscrit dans la durée. Le parti socialiste (les partis socialistes ?) prépare (nt?) le congrès de novembre, en passant par des textes ; en sortira-t-il une stratégie, en particulier face à la montée d’Olivier Besancenot ? On a critiqué l’idée selon laquelle celui-ci serait le Le Pen de la gauche… Il est certain qu’en France, nation qui n’a pas connu l’épreuve d’un régime communiste tout en ayant une culture révolutionnaire ancrée en elle depuis plus de deux cents ans, l’extrême gauche ne suscite pas la répulsion que suscite l’extrême droite depuis la Seconde Guerre mondiale. Pourtant, Besancenot sera un vrai handicap, et de manière plus subtile : la « menace Le Pen » ne demandait à la droite qu’un peu de patience et d’habileté manœuvrière. La « menace Besancenot » risque de paralyser la mue idéologique du PS, et l’idéologie est plus importante à gauche qu’à droite. On entend déjà dire qu’il ne faut pas laisser « d’espace » à Besancenot pour développer son « grand parti anticapitaliste ». Rappelons que le Parti socialiste n’a toujours pas fini de payer le prix idéologique de la stratégie d’union de la gauche avec un PC décadent, stratégie qui lui a permis d’accéder au pouvoir mais l’a gêné pour en tirer les conséquences théoriques. Pour régler ce problème, les calculs de court terme ne sont d’aucun secours…
À droite, si Nicolas Sarkozy avait su inscrire sa stratégie électorale (fédérer les droites) dans la durée, la maintenir contre vent et marées, l’élargissement du discours opéré au cours de la campagne, lui aussi très pensé stratégiquement, plus la crise personnelle d’après la victoire (qui a confirmé toutes mes préventions envers les régimes monarchiques) et la continuation au pouvoir du mode de fonctionnement de la campagne électorale ont empêché tout choix clair entre la maîtrise du temps prôné par Nicolas Sarkozy lui-même en 2002 (un quinquennat, c’est 2 ans pour faire des réformes, 2 ans pour en gérer les conséquences et 1 an pour faire campagne) et un pilotage évoquant curieusement la campagne de Ségolène Royal, entassant les effets d’annonce et brouillant totalement l’image. De ce côté, on n’a certainement pas fini de mesurer avec effroi les conséquences de la marginalisation de François Fillon, d’ailleurs élément important du ralliement à Nicolas Sarkozy de l’électorat « classique » de la droite.
Au centre, François Bayrou est bien forcé de s’inscrire dans la durée… Mais il est au fond marginalisé depuis 2002. Il peut rêver d’un destin à la Clemenceau, infatigable bretteur d’opposition devenant tardivement, en 1906, un chef de gouvernement.
Pour tout ceux là, il faudra cependant apprendre, s’ils ne veulent pas crouler face à la coalition de l’extrême gauche et du corporatisme syndical, à parler aux électeurs un autre langage que celui de l’intérêt. Les désastreuses promesses en matière de pouvoir d’achat sont là pour le rappeler. Si les électeurs s’achetaient purement et simplement, tous les gouvernements qui ont perdu les législatives depuis les années 1980, après avoir laissé filer le budget et multiplié les promesses, seraient restés en place…

vendredi 20 juin 2008

Des contradictions françaises


Dans les Pensées, maximes et anecdotes de Chamfort, publiées après sa mort survenue en 1794 (il fut victime de la Terreur), on trouve la pépite suivante :
« En France, tout le monde paraît avoir de l’esprit, et la raison en est simple : comme tout y est une suite de contradictions, la plus légère attention possible suffit pour les faire remarquer et rapprocher deux choses contradictoires. Cela fait des contrastes tout naturel, qui donnent à celui qui s’en avise l’air d’un homme qui a beaucoup d’esprit. Raconter, c’est faire des grotesques [entendre : des caricatures]. Un simple nouvelliste devient un bon plaisant, comme l’historien, un jour, aura l’air d’un auteur satirique. »
La France, terre non seulement des contrastes, mais des contradictions… Lecture pessimiste : le pays est souvent schizophrène, et pour cela très difficile à réformer. Lecture optimiste : surmonter les contradictions, les tensions, implique un dépassement créateur. De ce point de vue, la liberté intellectuelle n’existe que dans les tensions, dans les failles logiques. Lecture encore plus optimiste : on peut rêver d’un équilibre, d’un état social qui tenterait d’assumer des requêtes contradictoires…
La France politique est bien cette terre des tensions longtemps poussées au maximum entre tradition et modernité, entre religiosité et laïcité, entre aspirations monarchiques et idéal républicain, entre égalitarisme et libéralisme. Peut-être s’y est-elle un peu épuisée, et peut-être la synthèse gaulliste, un temps créatrice, l’a-t-elle endormie.
Les tensions françaises – je pense à celle entre ordre et liberté dans laquelle Éric Anceau voit l’enjeu majeur du XIXe siècle – ont longtemps été, poussées à l’extrême, celles de tous les puissances. Est-ce encore le cas ? Aujourd’hui, ce jeu infini des tensions franco-françaises est confronté à des dynamiques qui le dépassent. Si l’on suit François Furet, Francis Fukuyama et Ernst Nolte (en laissant pour aujourd’hui de côté la question chez ce dernier de la connexion entre communisme et nazisme, qui a suscité d’infinis débats), il n’y a au fond qu’une révolution, au double visage, celle de l’affirmation de la démocratie libérale couplée avec le capitalisme, qu’on pourrait résumer par l’avènement de l’individualisme moderne. Le communisme comme le fascisme auraient été des réactions à cette révolution (et aux problèmes qu’elle posait). Peut-être pourrait-on enrichir ces grandes pensées en y réintroduisant la nation ; le défi politique de notre temps est sans doute, pour chaque pays, d’exploiter l’ensemble de ses ressources propres afin de créer une version de cette modernité, pas forcément incompatible avec les autres, qui permette à la nation de n’être pas seulement objet, mais partie prenante, contributrice pour elle et pour les autres, de ce grand processus démocratico-libéral.
En effet, on le sait depuis Tocqueville (et même bien avant, si l’on lit Rousseau), la grande révolution contemporaine a elle-même ses tensions : ses lignes de force, sa légitimité, mais aussi ses failles et ses insuffisances. Elle est à la fois irréversible et indéterminée – je ne suis pas sûr qu’au fond de nos tensions franco-françaises ne se trouvent pas bien des orientations fécondes.
Je ne donnerai qu’un exemple : la natalité. La France est ici la dépositaire de deux héritages : celui d’abord d’un consensus sur la politique familiale, qui naît à la fin des années 1930, alors que gauches et droites sont persuadées que la dénatalité est un fléau, et qui se prolonge jusqu’à la fin des années 1960. Celui ensuite des années 1960 et 1970, quand l’émancipation de la femme devient une priorité : la France réussit ainsi à combiner aujourd’hui un taux de natalité plus fort que celui de ses voisins européens et un bon accès des femmes aux études supérieures et aux emplois qualifiés, même si bien des progrès peuvent être réalisés. Ici, c’est nous qui pouvons servir de modèle à l’Allemagne, à l’Espagne, à l’Italie, où l’investissement par les femmes de la vie professionnelle et des emplois qualifiés a coïncidé avec une baisse dramatique de la natalité.

samedi 14 juin 2008

Retour au chiraquisme ?


Le comportement très digne et réservé de Jacques Chirac depuis la fin de son deuxième mandat, qui contraste avec celui de Dominique de Villepin – il est vrai que l’un a accompli pleinement sa carrière politique tandis que l’autre peut se sentir frustré – incite à revenir sur son bilan et sur la trace qu’il a pu laisser dans la vie politique française.
Deux mandats donc, 1995-2002 et 2002-2007. Cinq ans de cohabitation, de 1997 à 2004, finalement donc juste sept ans de plein exercice du pouvoir, ajoutés à quatre ans de premier ministère, en 1974-1976 et 1986-1988. Trois candidatures à la présidentielle, deux présences au second tour, une dissolution ratée en 1997. Tous ses biographes le disent, un bel « animal politique », taillé pour la conquête du pouvoir, capable de rebondir, globalement peu populaire, mais ayant réussi, même au temps de ses échecs, à fidéliser une partie importante de l’électorat, et apte à s’emparer de positions clefs : le parti gaulliste au temps de la présidence giscardienne, la mairie de Paris. Comme tous les hommes politiques réputés opportunistes, il a quelques fidélités, et parmi elles, un grand patriotisme. Qu’il soit contre l’Europe (au moment de l’appel de Cochin, soufflé par Marie-France Garaud et Pierre Juillet qui y perdirent leur statut de mentors) ou pour elle (au moment de la ratification du traité de Maastricht, de 1992, pour lequel son ralliement fut décisif), qu’il croie en un « travaillisme à la française » (1974-1976) ou en des réformes libérales (1986-1988), il s’agit toujours de mettre la France à niveau, de la maintenir dans la course. La trace de Jacques Chirac reste ainsi importante dans la politique extérieure : déterminant (qui lui en a su gré ?) dans le dénouement de la crise yougoslave par le recours à l’OTAN, remportant une victoire symbolique forte en 2003 en désapprouvant l’intervention américaine en Irak, déterminant encore pour obtenir, cette fois à nouveau en collaboration avec les États-Unis, que la Syrie se retire du Liban, il a réaffirmé haut et fort la « politique arabe de la France ». On peut en penser ce que l’on veut, mais il y a là une ligne. Ajoutons qu’en 1995, la suppression de la conscription, réforme longtemps réputée infaisable, témoignait d’un projet de modernisation de l’armée française.
D’une certaine manière, ce Jacques Chirac là est celui qui s’est levé et qui est parti, simplement, parce que dans un stade de football, lors d’un France-Algérie, le public sifflait la marseillaise.
Partout où la « boussole nationale » ne pouvait fonctionner de manière claire, la trajectoire s’est faite plus erratique. Comme l’avait remarqué Éric Zemmour (L’Homme qui ne s’aimait pas, Paris, Denoël, 2004), comme on le comprend à la lecture des deux biographies de Franz-Olivier Gisbert (celle de 1988 et La Tragédie du président, best-seller paru chez Flammarion en 2006), Jacques-Chirac est un leader particulier, qui doute plus que les autres de sa valeur et de sa capacité. C’est aussi un homme écartelé entre l’Occident et les autres cultures, et, en fait entre la droite et la gauche, entré en politique au temps ou la droite pouvait pensait qu’elle était simplement le camp de « réalistes » contre les « trublions ». Un homme profondément marqué par son échec de 1988, puis par le mouvement de décembre 1995 contre les réformes d’Alain Juppé (de la sécurité sociale et des retraites), persuadé que la France est un pays fragile, qu’il ne faut pas traumatiser, un homme qui ne saura que faire du pouvoir qui lui revient « miraculeusement » en 2002 après l’échec de 1997, et qui campe désormais sur une position que l’on pourrait résumer ainsi : nous allons faire les réformes que l’on ne peut vraiment pas éviter, sans plus.
La fondation de l’UMP en 2002 ne parvient pas à la fédération totale des droites, en partie parce qu’elle se fait avant qu’un projet politique clair ait été formulé. Il est remarquable de constater qu’en France, gaullisme et socialisme ont empêché chacun la modernisation de l’autre en ne se reformulant pas clairement alors que leur pratique se modifiait à toute vitesse. À François Mitterrand l’européen, totalement indifférent aux enjeux idéologiques, répond Jacques Chirac le patriote, privilégiant lui aussi la pensée stratégique.
Modernisation minimale, toujours en retard par rapport aux enjeux de la mondialisation et de l’intégration européenne, incapacité à enrayer le décrochage relatif du pays, brouillage du discours de son camp : en cela, le « chiraquisme » a fourni un repoussoir utile à Nicolas Sarkozy. Pour sa campagne, au moins celle du premier tour… Cependant, le « chiraquisme » resurgit actuellement à l’horizon de la politique française. Le hiatus entre l’Élysée et Matignon, les grandes déclarations sur l’histoire de l’esclavage à enseigner dans les écoles primaires, le discours sur le « pouvoir d’achat », la tendance à privilégier des réponses de court terme, à vouloir éviter toute mesure symbolique d’une rupture (les 35 heures demeurant la durée officielle du travail, les 60 ans l’âge légal de la retraite, et des stratégies complexes de contournement étant mises en œuvre), l’accoutumance maintenue à voir l’État « débloquer » (mot savoureux) de l’argent public dès qu’un mécontentement catégoriel s’exprime avec tant soit peu de vigueur, tout cela s’inscrit facilement dans une continuité… On peut se demander, de ce point de vue, si Xavier Bertrand n’est pas l’homme tout désigné d’un retour au « gaullo-radical-socialisme »…

vendredi 6 juin 2008

Bonapartisme et gaullisme


Pendant la Seconde guerre mondiale, à Londres, Raymond Aron comparaît déjà le gaullisme naissant au bonapartisme, dans un article intitulé « L’ombre des Bonaparte » et publié en 1943. Plus tard, l’historien René Rémond, avec sa grande synthèse sur Les Droites en France, dont la première édition date de 1954 (le titre alors était au singulier, La Droite en France de 1815 à nos jours, continuité et diversité d’une tradition politique), a donné à cette comparaison tout son développement. Dans le Dictionnaire de Gaulle paru chez Laffont en 2006, on trouve un article « bonapartisme », dû à Jean-François Sirinelli, qui met en avant les difficultés liées à l’usage polémique du terme (on accuse de bonapartisme quelqu’un dont on met en doute la légitimité républicaine).

En laissant de côté les filiations concrètes, nous pourrions définir le bonapartisme comme un « possible » de la démocratie française. Nous le connaissons mieux encore aujourd’hui grâce à la grande biographie qu’Éric Anceau vient de consacrer à Napoléon III (Napoléon III. Un Saint-Simon à cheval, Paris, Taillandier, 2008). Résolument centrée sur le personnage et sur son projet, celle-ci nous permet de mieux saisir la « synthèse bonapartiste », d’en saisir toute l’ambition et tout l’intérêt, au travers de l’étude d’une figure attachante - et aussi de mieux comprendre le gaullisme qui ressemble au bonapartisme par bien des côtés.

Volonté de synthèse entre l’ordre et la liberté, qui explique malgré l’aspect très autoritaire des premières années du régime, l’évolution du régime vers l’empire libéral ; méfiance vis-à-vis du parlementarisme considéré comme étranger à la tradition nationale caractérisent tout d’abord l’entreprise. L’empire libéral n’est (contrairement à ce que j’écrivais dans mon article précédent) que semi-parlementaire, et n’est tenté par l’Empereur qu’à titre d’expérience – on ne prend en somme qu’une dose de parlementarisme.

Volonté de synthèse entre la tradition (l’appui sur le catholicisme) et la modernité (volonté de développement économique), de synthèse entre l’affirmation de l’intérêt national (qui limite le soutien aux nationalités en Italie et en Allemagne) et la volonté de promouvoir le dialogue international par un système périodique de congrès réunissant le plus grand nombre possibles d’État (cela restant un projet) ; volonté de synthèse entre le maintien de l’ordre social et la mise en place d’une politique sociale ambitieuse (soutien aux mutuelles ouvrières, droit de grève accordé en 1864, syndicats tolérés en 1868)...

Mais volonté de synthèse qui connaît malgré une très forte concentration des pouvoirs bien des difficultés pour se traduire dans une politique concrète : la violence déployée pour vaincre la résistance au coup d’État rend les républicains souvent irréconciliables avec le régime, même quand celui-ci se libéralise, les élites orléanistes freinent les investissements publics et n’acceptent la politique sociale qu’au prix d’un retour à l’orthodoxie financière, la politique étrangère devient brouillonne dans les années 1860 et ne garantit au final ni l’ordre européen ni la sécurité de la France qui s’abîme dans le désastre de 1870.

Éric Anceau nous montre à la fois la fermeté des lignes directrices de Louis-Napoléon Bonaparte, en qui il voit le vrai créateur du bonapartisme, et les prudences, qui vont parfois jusqu’à l’hésitation ou l’incohérence, dans la mise en œuvre. On a l’impression que la volonté politique se perd parfois dans les sables, sauf en quelques domaines (notamment, la politique économique et urbaine). Le projet est souvent étonnamment moderne, mais en même temps que des lignes de force de la politique française d’après 1958, on peut voir l’esquisse des limites politiques du gaullisme, qui ressemble fortement à l’idéologie bonapartiste.

La volonté de synthèse du pouvoir rend difficile l’expression d’un véritable pluralisme politique : les transactions se font en amont de la décision, dans les coulisses en somme, dans l’écoute directe de l’opinion (difficile à saisir), dans la quête du soutien des experts et des milieux dirigeants ; la concentration du pouvoir rend le pays extraordinairement vulnérable aux éventuelles défaillances du souverain (ce que montre bien la politique extérieure et les valses-hésitations quant à la politique à tenir après la victoire de la Prusse à Sadowa, en 1866, qui écrase l’Autriche et dont les conséquences seront lourdes pour le pays). Le « centrisme autoritaire » (Frédéric Bluche) du bonapartisme risque toujours de le conduire à l’immobilisme, quand bien même il se veut réformateur et surtout modernisateur ; il semble ne pouvoir fonctionner qu’à demi-régime (ce qui en soit n’est pas grave, le compromis étant après tout un des traits essentiels de la politique moderne), et encore faut-il que les gouvernants aient au départ de fermes perspectives. Philippe Séguin, dans son plaidoyer Louis-Napoléon le Grand avait défini la politique comme une lutte contre l’impuissance. Il semble que ce soit particulièrement vrai dans le cadre du bonapartisme – et sans doute dans celui d’un régime marqué par le gaullisme.
Vouloir tout faire à la fois, satisfaire toutes les requêtes, rechercher obstinément le consensus : cela est louable dans le souci d’incarner la nation toute entière ; mais le prix à payer est souvent celui de la lisibilité politique. Le tiraillement entre les requêtes de l’identité (ce que l’on veut incarner) et celles de l’action (ce que l’on veut faire en priorité) apparaît ici à nu…