lundi 8 septembre 2008

Rentrée politique, rentrée sociale et pouvoir d'achat


Rentrée sociale chaude ou pas ? Le mécontentement chronique et un certain fatalisme se actuellement l’opinion. Le premier ministre, qui paraît requinqué, campe sur le maintien du cap des réformes, la position du président est un peu moins claire. Il est un domaine où la contrainte politique et aussi la force des habitudes pèse de tout son poids, celui des dépenses publiques… la pesanteur propre de notre Ve République est administrative. Je ne peux m’empêcher de penser que l’’Etat modernisateur des débuts de la IVe et de la Ve République a fait place à un État encore important, mais un peu à la traîne, ayant perdu sa conviction d’incarner l’intérêt général à lui seul sans parvenir à ses défaire des prérogatives attachées à cette vocation. On pense au propos de Chateaubriand sur la royauté de Saint-Louis sans la religion de Saint-Louis, qu’il appliquait à la crise que l’idée monarchique connaissait et en France à son époque.
Chateaubriand disait cela en étant monarchiste. J’écris ces lignes en étant fonctionnaire, et profondément persuadé que l’État conserve, en régime libéral, un rôle fondamental (il suffit de suivre l’actualité américaine pour s’en convaincre).
Mais cela est bien connu… c’est sur un autre point que je voudrais insister. Il y a toujours, dans l’actualité, quelque chose qui suscite l’étonnement, une orientation, une décision qui paraît surréaliste. En ce moment, pour moi, c’est la communication du gouvernement sur le pouvoir d’achat, qui me fait penser à une analyse de Tocqueville.
Ce dernier se proposait d’écrire, à la suite de l’Ancien Régime et la Révolution, une histoire de la Révolution française, dont les fragments ont été publiés dans la Pléiade, par François Furet (qui avait commencé d’y travailler avant sa mort) et Françoise Mélonio.
On retrouve dans ces fragments le sens de l’ironie, de la relativité de l’action politique, qui fait tout le sel des Souvenirs… En particulier lorsqu’il commente la décision du Conseil royal en 1788 : doublement du nombre des représentants du tiers-état, couplée avec une non-décision : remettre à plus tard la question de savoir si l’on voterait par ordre ou par tête.
« De tous les partis à prendre, écrit Tocqueville, celui-là était assurément le plus dangereux. (…) On avait fourni au Tiers État l’occasion de s’enhardir, de s’aguerrir, de se compter. Son ardeur s’était accrue sans mesure et on avait doublé le poids de sa masse. Après lui avoir ainsi permis d’abord de tout espérer, on finissait par lui laisser tout craindre. On avait mis en quelque sorte devant ses yeux la victoire, mais on ne lui avait pas donnée. On ne lui faisait que l’inviter à la prendre . »
Si le projet du roi était de combiner réforme fiscale modérée et maintien de la société d’ordres, en confirmant la sortie de la monarchie absolue, alors, effectivement, cette mesure était désastreuse.
Il est vrai que souvent les gouvernements semblent, comme le remarque Tocqueville, conspirer à leur perte. Revenons à notre gouvernement : il a un plan de réformes libérales, qui ne peuvent porter leur fruit qu’à l’horizon de quelques années. Il est dans une conjoncture économique difficile. Les caisses de l’État sont vides, dit-on, mais la réalité est pire : l’État est à la fois surendetté et en déficit. S’il y avait bien quelque chose à oublier de la campagne (Churchill disait que les partis ne pouvaient jamais être très fiers de ce qu’ils ont dit pendant une campagne électorale), c’étaient les promesses concernant le pouvoir d’achat… Et le gouvernement, tout seul, face à une opposition exsangue et des syndicats mobilisés, a mis ce thème au centre de sa communication, focalisant ainsi l’attention des médias sur le seul point sur lequel il ne peut mettre en avant aucun résultat…
Il faudrait sans doute savoir ce qui vient dans cette affaire de l’Élysée et ce qui vient de Matignon. Mais cela est une autre histoire…

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