François Hollande apparait aujourd’hui, de l’avis unanime, comme le principal bénéficiaire de l’affaire DSK, et ce d’autant plus qu’il avait déjà entamé avant l’affaire, face à son éventuel rival, une remontée dans les sondages. On nous explique aujourd’hui qu’il serait victime d’un « TSH » (« Tout sauf Hollande ») au parti socialiste, mais je suis d’accord avec Olivier Duhamel qui ce matin, sur Europe 1, disait qu’il n’y avait rien de comparable avec le « Tout sauf Royal » de 2008 au parti socialiste.
Cependant, pour comprendre les difficultés auxquelles va se heurter François Hollande, dans son rapport au parti socialiste comme dans son rapport à l’opinion, il faut saisir son équation personnelle, chercher à inventorier ses forces et ses faiblesses.
C’est toujours bon de se relire, ou au moins de se souvenir de ce que l’on a écrit. J’ai deux fois abordé le cas Hollande dans ce blog.
Une première fois, je me suis penché sur la réflexion qu’il menait, avec finesse et indépendance, sur la manière dont le PS pouvait et devait accomplir la mutation idéologique rendue nécessaire par son exercice du pouvoir des 1981-1986, 1988-1993 et 1997-2002. Cette mutation est en grande partie réalisée, la déclaration de principes de 2008 comme le programme présidentiel de 2012 en témoignent – elle reste à achever.
La seconde fois, ayant assisté à l’enregistrement d’une émission télévisée ou il était invité, je me suis inquiété d’une « normalisation » de son discours : à force de vouloir incarner l’ensemble des socialistes, cet esprit vif et original ne me paraissait plus rien dire de saillant.
Atouts et handicaps… il faudrait revenir sur cela, maintenant que François Hollande est dans la position, toujours périlleuse, du favori des sondages.
Ce qui me faisait prendre au sérieux la candidature Hollande, c’est qu’elle s’inscrivait dans la durée. L’homme est parti de loin, y pense depuis longtemps, depuis son départ du poste de premier secrétaire du parti socialiste. L’ancrage corrézien, revendiqué, cultivé, les déplacements, les rencontres multipliées, la disponibilité à la discussion, tout cela construit un personnage public. Les Français connaissent bien cet homme, il fait partie du paysage et incarne une certaine continuité, l’image d’un socialisme raisonnable, qui cherche à se moderniser sans se brutaliser ; les journalistes apprécient son esprit, ses bons mots, son recul. Dans un milieu où l’arrogance et l’affirmation maladive de soi sont souvent la règle, cet homme tranche depuis longtemps par son côté sympathique et courtois. L’image d’un personnage qui trace son chemin progressivement, tranquillement, jusqu’à une modestie apparente, peut, dans l’électorat qu’il veut séduire, contraster heureusement avec celle de Nicolas Sarkozy. Il rassure.
Tout cela, sans être fabriqué, relève de l’image. Les vrais handicaps sont ailleurs. On sait que François Hollande n’a jamais été ministre. Certes, cela peut se retourner : il est, sur ce point, un homme neuf. Premier secrétaire du parti socialiste, il a bien mené la rénovation idéologique autour de la déclaration de 2008, son dernier combat, mais il s’est épuisé auparavant dans des synthèses peu enthousiasmantes. Il n’a pas de courant, et apparaît ainsi comme un homme seul, et ses soutiens sont peu visibles. Il a mis longtemps à se remettre de l’échec de 2005 : alors qu’il avait réussi à imposer la ligne du « oui » au PS, il n’a pas pu ensuite garantir la discipline du parti dans la campagne. Il n’a pas réussi à surmonter le « non » pour se présenter en 2007, et n’a pas tenté de forcer le destin. Bref, il a été l’homme de la synthèse dans un parti qui n’en voulait pas, et non pas le porteur d’un projet fort.
D’où des incertitudes : François Hollande saura-t-il construire un projet présidentiel fort, rassembler une véritable équipe avec quelques « poids lourds » ? Ou va-t-il rester dans un certain flou artistique, cherchant à rassembler la gauche en valorisant son expérience de premier secrétaire et l’héritage de Lionel Jospin, tout en voulant mordre sur le centre par sa modération naturelle d’ancien deloriste ? Saura-t-il mobiliser l’ensemble des énergies socialistes s’il devient le candidat ? Et s’il le fait, n’aura-t-il pas trop moucheté le fleuret ? Pour l’instant, j’ai le sentiment que François Hollande s’est dissout dans l’action collective et affirmé dans une démarche solitaire. Il n’est pas sensible à la mystique de la « rencontre d’un homme (ou d’une femme) et d’un peuple » qui a hanté Ségolène Royal et François Bayrou – mais la seule alternative à cette conception reste la construction d’un projet collectif.
Cependant, pour comprendre les difficultés auxquelles va se heurter François Hollande, dans son rapport au parti socialiste comme dans son rapport à l’opinion, il faut saisir son équation personnelle, chercher à inventorier ses forces et ses faiblesses.
C’est toujours bon de se relire, ou au moins de se souvenir de ce que l’on a écrit. J’ai deux fois abordé le cas Hollande dans ce blog.
Une première fois, je me suis penché sur la réflexion qu’il menait, avec finesse et indépendance, sur la manière dont le PS pouvait et devait accomplir la mutation idéologique rendue nécessaire par son exercice du pouvoir des 1981-1986, 1988-1993 et 1997-2002. Cette mutation est en grande partie réalisée, la déclaration de principes de 2008 comme le programme présidentiel de 2012 en témoignent – elle reste à achever.
La seconde fois, ayant assisté à l’enregistrement d’une émission télévisée ou il était invité, je me suis inquiété d’une « normalisation » de son discours : à force de vouloir incarner l’ensemble des socialistes, cet esprit vif et original ne me paraissait plus rien dire de saillant.
Atouts et handicaps… il faudrait revenir sur cela, maintenant que François Hollande est dans la position, toujours périlleuse, du favori des sondages.
Ce qui me faisait prendre au sérieux la candidature Hollande, c’est qu’elle s’inscrivait dans la durée. L’homme est parti de loin, y pense depuis longtemps, depuis son départ du poste de premier secrétaire du parti socialiste. L’ancrage corrézien, revendiqué, cultivé, les déplacements, les rencontres multipliées, la disponibilité à la discussion, tout cela construit un personnage public. Les Français connaissent bien cet homme, il fait partie du paysage et incarne une certaine continuité, l’image d’un socialisme raisonnable, qui cherche à se moderniser sans se brutaliser ; les journalistes apprécient son esprit, ses bons mots, son recul. Dans un milieu où l’arrogance et l’affirmation maladive de soi sont souvent la règle, cet homme tranche depuis longtemps par son côté sympathique et courtois. L’image d’un personnage qui trace son chemin progressivement, tranquillement, jusqu’à une modestie apparente, peut, dans l’électorat qu’il veut séduire, contraster heureusement avec celle de Nicolas Sarkozy. Il rassure.
Tout cela, sans être fabriqué, relève de l’image. Les vrais handicaps sont ailleurs. On sait que François Hollande n’a jamais été ministre. Certes, cela peut se retourner : il est, sur ce point, un homme neuf. Premier secrétaire du parti socialiste, il a bien mené la rénovation idéologique autour de la déclaration de 2008, son dernier combat, mais il s’est épuisé auparavant dans des synthèses peu enthousiasmantes. Il n’a pas de courant, et apparaît ainsi comme un homme seul, et ses soutiens sont peu visibles. Il a mis longtemps à se remettre de l’échec de 2005 : alors qu’il avait réussi à imposer la ligne du « oui » au PS, il n’a pas pu ensuite garantir la discipline du parti dans la campagne. Il n’a pas réussi à surmonter le « non » pour se présenter en 2007, et n’a pas tenté de forcer le destin. Bref, il a été l’homme de la synthèse dans un parti qui n’en voulait pas, et non pas le porteur d’un projet fort.
D’où des incertitudes : François Hollande saura-t-il construire un projet présidentiel fort, rassembler une véritable équipe avec quelques « poids lourds » ? Ou va-t-il rester dans un certain flou artistique, cherchant à rassembler la gauche en valorisant son expérience de premier secrétaire et l’héritage de Lionel Jospin, tout en voulant mordre sur le centre par sa modération naturelle d’ancien deloriste ? Saura-t-il mobiliser l’ensemble des énergies socialistes s’il devient le candidat ? Et s’il le fait, n’aura-t-il pas trop moucheté le fleuret ? Pour l’instant, j’ai le sentiment que François Hollande s’est dissout dans l’action collective et affirmé dans une démarche solitaire. Il n’est pas sensible à la mystique de la « rencontre d’un homme (ou d’une femme) et d’un peuple » qui a hanté Ségolène Royal et François Bayrou – mais la seule alternative à cette conception reste la construction d’un projet collectif.